samedi 9 novembre 2013

Jean-Baptiste Greuze et Gabrielle Babuty

Une jolie libraire de la rue Saint-Jacques, Mlle Babuty, s’est jetée au cou de M. Greuze, Peintre moralisateur, et l’a contraint à l’amour.
En 1759, ce petit fait divers n’étonne personne, car l’amour est considéré comme le seul maitre au monde. Le duc de Richelieu, courtisan « bel air », qui fournissait au roi quelques « caillettes » de choix, avait inventé une formule plaisante pour excuser les fredaines royales : «  L’amour est la consolation des hommes et principalement des princes, obligés de charmer les soucis du trône ».
En 1759, le roi, sans offusquer ses sujets, vient d’offrir à la Pompadour le titre de duchesse en récompense de ses bons et loyaux services. Depuis qu’une maladie bien fâcheuse lui a interdit d’enivrer les sens de Louis XV, elle est devenue sa plus précieuse collaboratrice. Elle s’occupe à la fois des affaires de l’Etat et des amours de Sa Majesté. C’est elle qui choisit le personnel et les invités des petits appartements et du Parc-aux-Cerfs. On connait, par les chroniqueurs et les pamphlétaires, le goût du roi pour la jeunesse, mais chacun se plaît à reconnaître que les adolescentes présentées par Mme de Pompadour, sont toujours traitées avec beaucoup d’égards. « Le roi, écrit Soulaire, était très gentil pour ses petites victimes à qui il enseignait l’écriture... D’ailleurs, il s’occupait aussi de les instruire des devoirs de la religion ». Plusieurs témoins ont affirmé que ces jeunes personnes n’étaient autorisées à se mettre dans le lit de Sa Majesté que lorsqu’elles avaient dit leur prière. »
Ce siècle frivole, où l’immoralité s’étale avec insouciance, a le mérite de ne pas être hypocrite. Il est de notoriété publique que les demoiselles de l’Opéra sont subventionnées par un ou plusieurs gentilshommes de bonne condition. On lit dans des rapports officiels que le frère de la Pompadour, le marquis de Marigny, directeur et ordonnateur général des Bâtiments, est l’amant d’une jeune fille charmante qui le trompe pour cent louis. Nul n’ignore que le prince de Soubise donne à Mlle Audinot, la maîtresse du duc de Lauzun, douze cents livres par mois, et la même somme à sa mère pour les dépenses de la maison ; ce prince prodigue alloue également trois mille livres à Mlles Guimard et Coste. M. de Beaujon n’éprouve pas le besoin de cacher sa passion pour la tendre Julie, fille Bonnesson. Les inspecteurs de police noircissent chaque jour des feuilles et des feuilles de comptes rendus concernant les amours de M. le receveur des tailles et de la généralité de Paris, de M. le trésorier des aumônes du roi, de M. le directeur général des grandes gabelles, de M. le président de la Cour des comptes...
Chamfort a rapporté une conversation entre Mme d’Esparbès et Louis XV, qui restitue assez bien le climat de galant cynisme qui est à la mode depuis la Régence.

« Tu as couché avec tous mes sujets ? dit le roi.
-          Ah ! Sire !
-          Tu as eu le comte de Choiseul ?
-          Il est si puissant !
-          Le maréchal de Richelieu ?
-          Il a tant d’esprit !
-          Montville ?
-          Il a la jambe si belle !
-          A la bonne heure ! Mais le duc d’Aumont, qui n’a rien de tout cela ?
-          Ah ! Sire, il est si attaché à Votre Majesté ! »

L’amour, quel qu’il soit, est alors le meilleur passe-temps des Français. Au théâtre, Marivaux fait applaudir les aventures de Marianne, jeune ingénue jetée dans les pièges de la grande ville : il lance, avec « les Jeux de l’amour » et « les Fausses Confidences, un terme qui convient à la légèreté des propos de salon : le marivaudage. A l’Opéra, Favart, l’ancien pâtissier, fait triompher le couplet galant.
Amourettes, parties fines, madrigaux de boudoirs sont les grands travaux auxquels se consacrent les petits-maîtres aux cheveux poudrés, qui promènent, de relais galant en reposoir d’amour, leurs talons rouges. Ils secouent d’un geste gracieux leurs tabatières, dont le couvercle s’orne de scènes qui sont le reflet des mœurs du temps. On y voit souvent des dames se trousser devant l’âtre, car il était d’usage, dans le meilleur monde, de se réchauffer de cette manière. Miniaturistes et graveurs ont répandu ce tableau intime sous lequel on peut lire de petits textes pleins de sous-entendus : « Entre deux feux », par exemple... On exploite également, dans la décoration des tabatières, les possibilités de « coup de vent » malicieux qui emporte la perruque du mari et fait voler les dessous de la dame. Quant à l’attente du clystère, c’est un sujet traité si fréquemment que l’on peut se demander si cette attente n’était pas la principale occupation des jolies femmes de ce siècle, dit « des lumières ».

Par réaction, le goût des amateurs sérieux s’oriente soudain en France vers les Flamands, maîtres des scènes familiales : la bonne ménagère, la mère allaitant, le bon médecin, etc. Ce retour à la peinture bien-pensante a été salué par l’abbé Laugier : « Dans ce siècle malheureux, où la passion pour le frivole a pris le dessus et où le joli a bien plus de crédit que le grand et le beau, il est fort simple que  les petits tableaux flamands fassent grande fortune ». La France étant prête à accueillir la peinture de genre, les personnages de la vie quotidienne vont, sur les toiles, remplacer les héros de la mythologie. Dans « L’Enseigne de Gersaint », Watteau lui-même s’est inspiré de la réalité : les emballeurs clouent une caisse, le commissionnaire attend, les commis entourent les clients pendant qu’un chien gratte ses puces. Dans les « Cris de Paris » de Boucher, c’est toute la vie de la rue que nous montre le spécialiste des nudités libertines. Cet engouement général est une des raisons du succès de Chardin, le maître du réalisme. A ses yeux, tous les objets sont dignes de figurer dans une scène familiale : un balai, un couteau, au même titre qu’un panier ou un râteau.

De cette peinture anecdotique, Jean-Baptiste Greuze, jeune artiste venu de Lyon, va faire une peinture philosophique. Son premier succès parisien, « Le Père de famille expliquant la Bible », est une scène du genre, dans laquelle se trouvent réunies toutes les qualités exigées par l’amateur : le sujet austère, le décor avec ses détails familiers, et les personnages bien attendrissants : les enfants, la grand-mère et le chien. Le chien plaît beaucoup. N’oublions pas que c’est le temps où J.-J. Rousseau vante les mérites du Turc, où Mme du Deffand pleure à tous les échos « sa pauvre défunte Mitounette », et où le « Mercure de France » publie, sur la fugue d’un chien, des poésies pour amis des bêtes :

Filles sensibles, tendres époux,
N’épargnez pas vos pleurs, je conçois vos tourments,
Azor a fui, Dieux ! quelle main jalouse
A pu le dérober à vos embrassements ?

Un amateur influent, M. de la Live de Jully, acheta « Le Père de famille », sa Bible et son chien. Il fit partout de tels éloges de Greuze qu’il réussit, en 1755, avec l’appui de Pigalle, à faire agréer le peintre à l’Académie française, ce qui lui donnait le droit d’exposer au Salon du Louvre.
Les œuvres de ce disciples des Hollandais séduisirent les critiques, Diderot le premier : « Quel peintre !... Quelle composition !... Ces tableaux font honneur à son esprit, ils font l’éloge de son cœur... Il est le Molière de la peinture. » Diderot, philosophe, homme de goût, critique excellent, oriente Greuze vers une esthétique littéraire. Selon les théories de l’encyclopédiste, les tableaux doivent exprimer des sentiments, ils doivent avoir un sens pathétique, et ce pathétique doit être moral.
Le peintre est chargé d’une mission sociale.

Diderot donne ses conseils en plein air, le long de la Seine. Sur le quai des Vieux-Augustins, il conduit celui qu’il appelle « son peintre » chez le père Babuty, son libraire préféré. Dans « Le Neveu de Rameau », il évoque cette boutique où il venait pour le seul plaisir de rencontrer Mlle Babuty, la jolie Gabrielle, fille du libraire : « Je l’ai bien aimée, moi, quand j’étais jeune et qu’elle s’appelait Mlle Babuty. Elle occupait une petite boutique de libraire sur le quai des Vieux-Augustins ; poupine, blanche et droite comme le lis, vermeille comme la rose. J’entrais avec cet air vif, ardent et fou que j’avais et je lui disais : « Mademoiselle, les Contes de La Fontaine, un Pétrone, s’il vous plaît ? –Monsieur, les voilà, ne vous faut-il point d’autres livres. – Pardonnez-moi, Mademoiselle, mais –Dites toujours... – « La Religieuse en chemise » ? –Fi donc ! Monsieur ! Est-ce qu’on a... est-ce qu’il lit ces vilenies-là ? – Ah ! Ah ! ce sont des vilenies, Mademoiselle ! Moi, je n’en savais rien !... »

Greuze admire la taille bien prise, la gorge parfaite, les épaules, le visage, les yeux ingénus, les lèvres bien dessinées de Mlle Babuty. Mais il est aussi timide que sensuel et, s’il revient souvent la voir, il n’ose lui demander de poser pour lui, il lui  achète des livres... c’est tout. Désireux de faire comme les maîtres, le peintre cherche le mécène qui l’emmènera en Italie. C’est l’abbé Gougenot, associé libre de l’académie de peinture et de sculpture, qui se chargera de montrer les ruines romaines au nouvel agréé. Il y séjournera deux années, portraiturant les ambassadeurs, et croquant les paysannes florentines ou les petits mendiants napolitains.

A son retour à Paris, il n’a pas oublié les charmes de Gabrielle Babuty. Hélas ! la boutique du libraire a changé de propriétaire. Diderot lui donne la nouvelle adresse du père Babuty, en bas de la rue Saint-Jacques. Cette rue, qui commence entre Saint-Séverin et Saint-Julien-le-Pauvre, après avoir été le chemin des pèlerins de Compostelle, est, en 1759, le marché permanent du livre et de l’image. C’est le rendez-vous des libraires, des imprimeurs, des relieurs et des marchands d’estampes qui ont pris la place des six mille écrivains copistes, des enlumineurs et des parchemineurs du Moyen-Age. Rue Saint-Jacques, on compte une trentaine de libraires, une trentaine d’autres se tiennent entre Notre-Dame et le Palais, quelques-uns sur les ponts, et seulement une demi-douzaine sur la rive droite, dont deux au Théâtre –Français. Les libraires de la rue Saint-Jacques et de Notre-Dame attendent chez eux la clientèle de la rive opposée : c’est alors que l’on voit se créer le métier nouveau de courtier en livres. « Quelques hommes indigents s’avisèrent de prendre un sac par leurs épaules, qu’ils avaient rempli de livres achetés ou pris à crédit dans les boutiques ; quelques pauvres femmes, à leur exemple, en remplirent leurs tablier, et les uns et les autres passèrent les ponts et se présentèrent aux portes des particuliers. Les libraires, dont ils facilitaient le débit, leur firent une petite remise qui les encouragea. Leur nombre s’accrut, ils entrèrent partout, ils trouvèrent de la faveur. »
Diderot défend les intérêts de M. Babuty et des libraires qu’il fréquente ; il maltraite ces marchands non syndiqués qui s’installent à leur compte dans les boutiques de la rive droite, « des gens sans qualités, sans mœurs, sans lumières, guidés par l’unique instinct de l’intérêt ». L’encyclopédiste a besoin de l’appui des libraires en cette année 1759, qui marque le début de la bataille de l’« Encyclopédie ». En effet, c’est le 8 mai que, retirant le privilège, on a obligé les libraires à indemniser les souscripteurs. L’interdiction du pape ne servira à rien ; chacun souhaitant vivement la continuation de l’ « Encyclopédie », aucun souscripteur ne se présenta pour recevoir le remboursement de ses soixante-douze livres.

Gresset, qui raconta si bien l’histoire de Vert-Vert, le perroquet impertinent, détestait la rue Saint-Jacques, parce qu’il devait la traverser pour se rendre au collège. Il l’a décrite dans un moment d’humeur :
                                   Cette pédantesque rue,
                                   Où trente faquins d’imprimeurs...

Faquins ou pas, les meilleurs sont là, en souvenir, peut-être, de la première imprimerie qui y fonctionna, à l’enseigne du Soleil d’Or, ameutant tous les scribes de l’université au XVe siècle. Tout ce qui s’imprime passe par ce quartier ; on édite, au coin de la rue de la Huchette, les almanachs, et l’on vend, à côté, les jeux de l’oie et les images saintes.
Entre un rôtisseur et un apothicaire, le père Babuty a ouvert sa seconde boutique, où J.-B. Greuze, amoureux, sera pris au piège du mariage.
Pour Gabrielle, qui a atteint la trentaine, le peintre est un parti avantageux. Il est bien de sa personne, il est connu, il est protégé par M. Diderot et il peint des tableaux convenables. Il  su profiter des conseils du bon encyclopédiste, le libertin, professeur de morale à ses heures : « Monsieur Greuze, lui a dit l’auteur des « Bijoux indiscrets » écoutez-moi... Boucher, Lagrenée et le jeune Fragonard mettent assez de fesses dans leurs tableaux, n’en mettez pas dans les vôtres. »
Greuze, obéissant, ne met dans ses compositions que des enfants, des felles, des vieillards et des animaux. Et tous ses modèles pensent, et tous sont chargés d’exprimer des idées philosophiques. Pour se distraire de ses travaux de psychologie appliquée, le peintre vient faire la conversation chez Mlle Babuty. Il aime à contempler ses yeux, ses lèvres, sa gorge où tremble une croix de Jeannette, symbole d’innocence. Les propos de M. Greuze sont aimables, à peine galants. Elle l’encourage à faire mieux par ses regards et ses pressions de mains, mais il conserve une attitude réservée. Cette histoire d’amour se termine par un mariage. L’amoureux transi épouse la belle Gabrielle. Ils furent heureux et eurent beaucoup d’enfants, c’est ce qu’on serait tenté d’écrire, si Greuze n’avait laissé un démenti à cette conclusion. En 1791, après trente-deux ans de vie conjugale, le peindre décide de reprendre sa liberté. Il veut divorcer et rédige un long mémoire désespéré, émouvant et ridicule. Dans ce texte peu connu qu’il destinait au procureur, on devine, à travers les ressentiments du mari bafoué, quelques attendrissements du mari bafoué au souvenir des amours d’autrefois :
                                                                                                                                                                                                                                                                              Citoyen,
Je vais vous révéler, malgré moi, des choses sur lesquelles j’avais jeté un voile funèbre ; vous verrez que l’on a entassé outrages sur soutrages ; mon honneur, ma vie, ma fortune et celle de mes enfants, engloutis par une mère dénaturée.
Peu de jours après être revenu de Rome, je ne sais par quelle fatalité, je passais dans la rue Saint-Jacques, j’aperçus Mlle Babuty dans son comptoir ; elle était fille de libraire ; je fus frappé d’admiration, car elle avait une très belle figure. Je demandais à acheter des livres pour avoir le temps de l’examiner.
Bien que trente ans soient passés, il n’a pas oublié l’émotion qu’il ressentait devant la beauté de Gabrielle. Il fallut sept années au peintre amoureux pour découvrir qu’elle était ce que Diderot appelle, par euphémisme, « la femme la plus violente ».

Mlle Babuty me connaissait, ma réputation était déjà commencée, j’étais reçu à l’Académie.
Ici, Greuze confond les termes, il ne sera reçu qu’en août 1769, à cette époque, il est seulement agréé.
... elle avait près de trente et quelques année, par conséquent menacée de faire la Sainte-Catherine toute sa vie ; elle employa toutes les cajoleries possibles pour m’engager de l’aller revoir, et que je n’avais que faire de prétextes, que l’on me verrait toujours avec plaisir. Je continuai à faire des visites pendant, à peu près, l’espace d’un mois. Un après-midi, je la trouvais plus animée qu’à son ordinaire ; elle tenait une de mes mains et, me regardant d’un air passionné, elle me dit : « Monsieur Greuze, m’épouseriez-vous si j’y consentais ?é Je vous avouerai que je fus confondu de pareille question ; je lui dis : « Mademoiselle, n’est-t-on pas trop heureux de passer sa vie avec une femme aussi aimable que vous ? » Je crois que cette manière de répondre était tout à fait insignifiante ; cela n’empêcha pas que sur-le-champ elle prit son parti, et, dès le lendemain matin, elle s’en fut avec sa mère sur le quai des Orfèvres, elle fit faire, chez M. Strass, des boucles d’oreilles de diamants faux et, le lendemain, elle n’eut rien de plus pressé que de les mettre à ses oreilles.

Comme elle demeurait dans une boutique, toutes les voisines ne manquèrent pas de lui en faire compliment, et de lui demander qui est-ce qui les lui avait données ; et, à demi voix, les yeux baissés, elle disait : « C’est M. Greuze qui m’en a fait présent. – Vous êtes donc mariée ? – Ha, non ! » (comme on dit oui, en secret, à tout le monde) Mes amis ne tardèrent pas à m’en faire compliment ; je les assurai qu’il n’y avait rien de plus faux et que je n’étais pas dans un état de fortune à me marier. Outré d’une pareille effronterie, je n’y retournai plus. Je demeurais alors dans le faubourg Saint-Germain, rue du Petit-Lion, dans un hôtel garni que l’on appelait l’hôtel des vignes. Il s’était passé trois jours sans que j’eusse entendu parler de rien ; je l’avais même déjà oubliée, lorsqu’un beau matin elle vint frapper à ma porte, accompagnée d’une petite cuisinières qu’elle avait ; je ne répondis point : elle savait que j’y étais, elle redouble des pieds, des mains, une vraie furie. Alors, voyant qu’elle pouvait se perdre de réputation, j’ouvris ma porte ; elle se précipite dans mon appartement, tout en larmes ; alors elle me dit : « J’ai tort, Monsieur Greuze, mais c’est l’amour qui m’a égarée ; c’est l’attachement que j’ai pour vous qui m’a fait servir d’un pareil stratagème ; ma vie est entre vos mains. » Alors elle se précipite à mes genoux, elle me dit qu’elle ne se relèvera pas que je ne lui aie promis de l’épouser, elle tenait mes deux mains qu’elle baignait de ses larmes ; j’en eux pitié et je lui promis tout ce qu’elel voulut. Cependant, nous ne fûmes mariés que deux ans après, dans la paroisse de Saint-Médard, qui n’était pas la sienne, de crainte des plaisanteries qu’on aurait pu faire, attendu qu’elle avait dit qu’elle était mariée.
Parmi ses croquis, Greuze écrit sur un carnet : « Le but du mariage ?... Deux être se réunissent pour se garer du malheur. » Cette union, commencée par un mensonge, se poursuit durant sept ans selon la définition du peintre.
De la rue du Petit-Lion à la rue de la Sorbonne, puis à la rue Pavée, M. et Mme Greuze transportent leur amour et leurs enfants.
Mme Geoffrin dit qu’ils en ont une « fricassée ». Le mot déplaît à Greuze qui se fâche. On ne doit pas se moquer de ces fillettes dont les joues rondes et les menottes inspirent l’heureux père des « Petites filles en camisole » et des « Enfants gâtées ». Ce foyer est joyeux jusqu’au jour où Mme Greuze trouve trop lourde la tâche de veiller sur ses enfants. On les met au couvent, où elles resteront, l’une onze ans et l’autre douze, presque abandonnées. L’aînée, recevant la visite de son père, lui dit un jour en pleurant : « Il y a un an et sept jours que maman ne nous a pas vues. » Maman, dont Greuze est toujours follement amoureux, est trop occupée de sa beauté, de ses toilettes et de son train de vie. Son ambition provoque le premier drame, lorsque le peintre donne à graver son fameux « Paralytique » :
Madame Greuze crut apercevoir une lueur de fortune et me dit : « Monsieur, il me faut un domestique ! » Je lui répondis : « Vous savez que nous n’avons pas de rentes et que, par conséquent, ce n’est pas une chose que nous puissions faire, dans ce moment-ci surtout, mais si vous voulez attendre après Pâques et si la vente est bonne je ferai en sorte de vous satisfaire. » Pour toute réponse elle m’appliqua un soufflet à tour de bras ; je vous avouerai que je fus tout transporté de colère et que je lui rendis.

Nous voici fort loin des scènes d’heureuse intimité, des compositions du peintre où se mêlent aimablement la vertu et le bonheur familial ! Pour gérer à sa guise les biens de la communauté, Gabrielle brouille son mari avec les graveurs, ses amis, et s’occupe elle-même de la vente des estampes exécutées d’après ses œuvres. L’imprudent ne connaît rien aux affaires et, lorsqu’il demande des comptes, on ne lui en donne pas :
Quelquefois, je me suis avisé de calculer et de dire : « Vos comptes ne me paraissent pas clairs ». Elle me répondait : « Monsieur, vous n’y entendez rien ! et croyez que je régis vos affaires mieux que vous ne le feriez vous-même ! » Je rentrais dans mon atelier, mes pinceaux à la main.
Mme Greuze est indiscutablement douée pour le commerce, puisqu’elle réussit à vendre pour trois cent mille livres d’estampes. Mais elle est distraite et elle dépense sans compter. En colifichet, produits de beauté et autres fantaisies, elle dilapide cent vingt mille livres. Lorsqu’il lui faut expliquer cette « erreur de caisse », elle raconte à son mari une histoire de placement dans une entreprise maritime ! Cette affaire aurait rapporté beaucoup d’argent si le vaisseau n’avait été pris par les Anglais. Elle prétend avoir oublié le nom du bateau comme celui du capitaine, et finalement, dans sa colère, déchire tous les registres. De plus, elle a pris l’habitude de faire tirer à cinq cents exemplaires, qu’elle vend pour son compte, les épreuves que son mari lui donne pour la récompenser de ses travaux. Jean-Baptiste ne reverra pas un centime de ces cent vingt mille livres.
La passion continue de l’aveugler, il ne peut résister au charme capiteux de Gabrielle. Diderot, qui surveille l’évolution de « son peintre », a noté le trouble que dégagent les portraits de Mme Greuze : « Cette bouche entr’ouverte, cette attitude renversée, ce cou gonflé, ce mélange voluptueux de peine et de plaisir font baisser les yeux et rougir toutes les honnêtes femmes... Si les femmes passent vite devant ce morceau, les hommes s’y arrêtent longtemps, j’entends ceux qui s’y connaissent et ceux qui, sous prétexte de s’y connaître, viennent jouir d’un spectacle de volupté forte, et ceux qui, comme moi réunissent les deux motifs. »

Le critique se montre moins satisfait du « Portrait de Madame Greuze enceinte » exposé au Salon du Louvre en 1765. Un peintre a-t-il le droit d’offrir ainsi sa femme au public ? L’artiste a penché la figure en avant et, par cette attitude, prétend Diderot, il semble dire au spectateur : « Voyez la gorge de ma femme ! – Je la vois, monsieur Greuze, je la vois !... Eh bien ! votre femme a la gorge molle et jaune, si elle ressemble, tant pis encore pour vous, pour elle et pour le tableau ! » Le critique rapporte ensuite le mot de M. de la Martellière qui, voyant un galant se rendre chez son épouse murmura : « Oui... oui... mais j’attends la cuisse ! »  Et en conclusion, Diderot revient à la gorge qui l’a tant choqué : « Mme Greuze a la tête aussi fort belle et rien n’empêchera M. Greuze de dire aussi, quelque jour, entre ses dents : « Oui, mais je l’attends à la gorge ! » Cela n’arrivera pas, car sa femme est sage...

Sage, elle ne le demeurera pas bien longtemps ! Les succès de Greuze, sa renommée, sa clientèle augmentent d’année en année. Au Louvre, où il est logé, les plus jolies femmes de Paris viennent commander leur portrait, les amateurs les plus difficiles désirent posséder une de ses toiles. On se presse pour admirer ses dernières œuvres. Dans l’atelier, les hommes admirent surtout le séduisant modèle, qui porte encore sur la poitrine la petite croix d’or qui charmait Diderot, mais qui avait fait dire à un prédicateur : « Peut-on plus mal placer la croix, symbole de mortification ? »
La petite libraire a changé. Elle a pris le ton et les manières des coquettes professionnelles, elle est provocante, effrontée, recherche le compliment et minaude en battant des cils. Son élégance est aussi agressive que son décolleté, et cette gorge à peine découverte sur les tableaux de son mari, elle la montre généreusement à la ville. Elle est parfumée, fardée et parée de mouches coquines. Ce genre de séduction ne peut amener que le désordre.
Le premier petit-maître qui la courtise de façon sérieuse, Blondel d’Azincourt, est un amateur d’art qui fréquente tous les ateliers du Louvre. Il est élégant, joli garçon, il sait parler aux femmes. Mme Greuze n’attend même pas qu’il la supplie : à peine lui a-t-il fait quelques grâces qu’elle lui accorde un rendez-vous.
Dès son arrivée dans l’atelier conjugal, elle lui ouvre les bras et l’entraîne derrière le paravent réservé au déshabillage des modèles. Charmé par un accueil si chaleureux, Blonde d’Azincourt prend l’habitude de venir saluer de galante manière le plus joli modèle de tout le Louvre. Dans les ateliers voisins, nul n’ignore l’aventure, car les amants imprudents ne se cachent guère. Abrités par le paravent, ils ne prennent même pas la précaution de pousser le verrou, ce verrou si cher aux graveurs polissons.

Ce qui devait arriver arriva : le mari les surprit : M. Blondel d’Azincourt conservant sa dignité, ajusta son habit, mit de l’ordre dans sa coiffure, remit ses bottes et salua M. Greuze. Malgré l’évidence, Gabrielle s’obstine à prétendre qu’il n’y a entre elle et l’amateur d’art que l’attachement d’une pure amitié. Le peintre souligne dans son mémoire les conséquences de cette mésaventure qui n’a rien de sentimental : M. d’Azincourt eut grande part au désagrément que j’éprouvai à l’Académie, parce qu’il était lié avec tous les artistes ; j’ai violemment soupçonné madame Greuze d’avoir préparé ce désagrément avec lui. Ce n’est donc  plus ma femme, c’est une ennemie avec qui je suis obligée de vivre que je vais trouver à chaque pas.
L’épouse trop coquette, ayant goûté le fruit défendu, attire ensuite derrière le paravent un élève de son mari : Je rentrai un jour sur les neuf heures, je trouvai Madame Greuze fort embarrassée de sa figure, mon élève debout devant la cheminée ne sachant que devenir ; je crus qu’il convenait de renvoyer ce jeune homme et je le fis. Alors le désespoir fut dans la maison, Madame Greuze, toujours un poignard à la main pour se tuer, n’en faisant cependant rien, et je fus inexorable.
L’écho des querelles du ménage dépasse le cercle des artistes et cause de grands torts au peintre des belles familles. Dans toute l’Europe on connaît la scandaleuse aventure du couple, et Diderot, l’ancien protecteur de Greuze, s’oppose à son départ pour la Russie où Catherine II désirait l’inviter. En juillet 1767, il communique sa décision à Falconet : « Tout bien considéré, nous n’enverrons point Greuze en Russie. C’est un excellent artiste, mais c’est une mauvaise tête. Il faut avoir ses dessins et ses tableaux et laisser là l’homme. Et puis sa femme est, d’un consentement unanime, la plus méchante créature qu’il y ait au monde. »

Le conseil, transmis à l’impératrice par Falconet, est suivi à la lettre. Falconet reçoit, en octobre de la même année, un message de Catherine II : « Je renonce, non aux ouvrages de Greuze, mais bien au personnage et à sa digne moitié. »
La « digne moitié » irrésistiblement entraînée vers la dissipation, choisit mal ses jeunes partenaires. Elle conduit, toujours derrière le paravent du péché, le fils d’un fruitier, un garnement dont le plus grand mérite est d’avoir dix-sept ans à peine... Le pauvre Greuze se contente de noter les faits : Bientôt Madame Greuze changea de goût ; certain fruitier-oranger qui m’avait servi lorsque je restais rue des Vieux –Augustins, chez un vitrier, en chambre garnie, m’avait fourni des falourdes ; il vint me voir et me dit que son fils avait des dispositions pour la peinture, que je l’obligerais infiniment si je voulais lui donner des conseils. Il avait seize à dix-sept ans, et Madame Greuze près de cinquante ; ce jeune homme lui plut...
Il lui plut tellement qu’elle commit l’imprudence de lui confier des objets et des estampes qu’il vendit, sans remettre l’argent à sa protectrice : Ce jeune homme était devenu libertin, je crois que Mme Greuze eut bien à s’en plaindre, puisqu’elle le fit arrêter comme lui ayant volé quinze mille livres. Il fut conduit chez M. Muron, exempt de police ; le père fut averti pour réclamer son fils ; ce galant homme, désolé de voir soupçonné son fils de vol, ne put s’empêcher de dire : « Madame, mon fils est un enfant et vous êtes une femme raisonnable ; pourquoi lui avez-vous confié une si grande somme ? Mais comme je suis un honnête homme et que je ne veux pas que vous perdiez tout, je vous donne sur ma maison, sise rue des Vieux-Augustins, deux mille livres, que vous prendrez après ma mort. » l’acte fut passé chez un notaire, dont elle a reçu l’argent à la mort de cet honnête homme, dont une partie fut employée à acheter en carrosse.

Hélas ! le greluchon indélicat avait laissé à l’amoureuse quinquagénaire une autre « incommodité », comme dit le mari berné : Elle fut obligée d’avoir recours à M. de Veluose, qui avait un excellent sirop anti-vénérien qui ne réussit pas... et elle fut obligée d’avoir recours à M. Louis, chirurgien secrétaire de l’Académie de chirurgie, qui termina la cure.

Greuze, oubliant son infortune, accepte de soigne lui-même l’épouse victime de l’amour ; peut-être espère-t-il, par ce dévouement, ramener la paix dans son ménage. Illusion ! quelques semaines plus tard il surprend, derrière un autre paravent, un nouveau galant dans les bras de sa femme : Elle fit la connaissance de M. de Saint-Maurice, conseiller au parlement... Sa figure en dessous, son air sournois et rampant, m’en avaient si fortement imposé qu’il fallait que je le visse pour le croire ; il avait si cruellement corrompu son cœur que les atrocités ne lui coûtaient rien. Rentrant chez moi, je la trouvai derrière le paravent, dans le salon de compagnie, dans une situation qui n’était point équivoque ; je me retirai, et, le lendemain, je luis fis des reproches, elle me dit : « Cela est vrai, mai sje m’en fous ! »

Cette insolente réponse n’empêche pas le peintre de poursuivre un tableau commencé : « L’Innocence offrant deux pigeons », dont le modèle est, malgré toute sa perfidie, l’incorrigible Gabrielle. Son mari est le dernier à la regarder avec une certaine indulgence, plus ou moins amoureuse, car dans Paris, elle s’est acquis une très fâcheuse renommée. Aux étalages des libraires, dans les bureaux d’images, on affiche une caricature ainsi dédicacée : « A très haute, très puissante, très ridicule dame, femme de J.-B. Greuze, reçu jadis peintre de genre sur un tableau d’histoire... »  Greuze acheta, pour les détruire, de nombreux exemplaires de cette estampe, mais le tirage était trop important pour qu’il pût en arrêter la diffusion.

Ni l’injure ni le blasphème ne peuvent complètement altérer à ses yeux le charme troublant de la coquine ; cette fois, elle a dit la vérité : »Elle s’en fout ! » Elle se moque de tout ce qui n’est pas son beau souci : ses atours et sa beauté. Cette année-là, la mode est si passionnante ! rose Bertin, la modiste de la nouvelle reine, vient de lancer les « poufs aux sentiments », étranges coiffures qui permettent, grâce à la variété des objets qu’elles contiennent, d’afficher les goût et les préférences de celles qui les portent. On y voit les ornements les plus curieux. Un chroniqueur a laissé une description du pouf aux sentiments confectionné pour la duchesse de Chartres : « Au fond était une femme assise sur son fauteuil et tenant un nourrisson, ce qui désignait le duc de Valois et sa nourrice. A droite était un perroquet becquetant une cerise, oiseau précieux de la princesse ; à gauche était un petit nègre, image de celui qu’elle aimait beaucoup ; le surplus était garni d’une touffe de cheveux du duc de Chartres, son mari, du duc de Penthièvre, son père, du duc d’Orléans, son beau-père. Tel était l’attirail dont la princesse se chargeait la tête. »
Un autre pouf aux sentiments, celui de la duchesse de Lauzun, attira l’attention de la comtesse d’Adhémar qui en a donné le détail dans ses « Souvenirs » : « La duchesse parut un jour chez la marquise du Deffand avec un pouf délicieux ; il offrait tout un paysage en relief : d’abord une mer agitée, des canards nageant sur ses bords, un chasseur à l’affût prêt à les coucher en joue ; sur le sommet un moulin dont la meunière se faisait courtiser par un abbé, et, tout au bas de l’oreille, on voyait le meunier conduisant un âne. »
On raconte que le pouf porté par Mme Greuze comprenait un jardinet dans lequel passait son carrosse, tandis que sur le côté droit, debout devant son chevalet, on reconnaissait M. Greuze, ce qui était une attention délicate ; l’ensemble était complété par un couple de colombes et les miniatures encadrées des demoiselles Greuze.
Cet étalage de sentimentalité n’empêche pas Gabrielle de poursuivre ses méfaits. Elle a brouillé son mari avec la plupart des artistes du Louvre. Mieux vaut déménager. Greuze transporte, en 1780, ses meubles, ses chevalets et ses toiles rue Thibotodé, où il peint encore des scènes de la vie de famille, alors qu’il n’a plus de foyer : Madame Greuze abandonnait sa maison aux domestiques, négligeant même sa cuisine au point que ses casseroles étaient probablement pleines de vert-de-gris ; je le présume, car on me fit chauffer un bouillon que je pris la veille de Noël et qui me mit aux portes de la mort ; car je fus quatorze heures dans les convulsions sans secours ; vainement l’on envoya chercher les chirurgiens et les médecins, personne ne voulut venir, que vers les sept heures du matin0

Faute de preuves, Greuze n’accuse pas sa femme d’avoir tenté de l’empoisonner, mais en revanche, il est formel quand il raconte qu’elle a voulu l’assommer : Nous couchions toujours dans la même chambre ; lorsque je me réveille en sursaut. J’aperçus Madame Greuze, à la lumière d’une lampe de nuit, qui allait m’écraser la tête avec son pot de chambre ; et alors je lui fis, comme vous devez bien penser, de vifs reproches... Elle me dit : « Si tu raisonnes, je crie à la garde, par la croisée, et je dirai que tu m’assassines. »

Les péripéties de cette nuit pénible, indiscrètement rapportées dans le quartier, amusent tellement les voisins que le peintre est contraint de déménager de nouveau. Il va habiter dans la rue Basse, près de la porte Saint-Denis, et, par prudence, installe dans une chambre séparée celle qu’il aime encore. L’épouse ne s’en plaint pas : une chambre bien meuble est plus propice à l’aventure qu’un paravent fragile ! Dans l’escalier Greuze croise des jeunes gens qui ne le saluent même pas. Je vis monter, vers les sept heures du soir, un jeune homme d’environ trente ans, qui, jadis avait été coiffeur. J’entrai chez elle sur-le-champ et je lui demandai ce qu’il voulait, que je n’avais pas l’honneur de le connaître ; il me dit tout bonnement : « Je viens voir Madame Greuze » et je lui répondis : « Ma femme ne reçoit que les hommes que je lui ai présentés et je ne vous connais pas. » Il me dit : « Cela m’est égal, et je viendrai chaque fois que Madame Greuze le requerra. »
Froissé de tant d’insolence, le mari bafoué se retire dans son atelier où il s’obstine à peindre le bonheur des autres. Le divorce, prononcé le 4 août 1793, mettra enfin un terme à cet enfer conjugal et fera disparaître à tout jamais l’odieuse Gabrielle de la vie du peintre.

Lorsque la R2volution a dispersé sa noble clientèle, il s’efforce de suivre encore les modes littéraires. Lui, qui autrefois, s’est attendri avec l’Opéra-Comique, qui a prêché la repopulation avec J.-J. Rousseau et la morale avec Diderot et Marmontel, se lance dans l’illustration du drame. Il exécute « la Malédiction paternelle » et « le Fils puni ». Mais la conception esthétique obéit à la politique : le public ne veut plus de vertu villageoise, il exige de la vertu romaine ; David a vaincu Greuze, les casseroles de la bonne ménagère disparaissent, on ne veut plus voir que des casques et des glaives. Les amateurs désertent l’atelier du vieux maître, qui doit demander un secours financier à la nation. Le 9 juin 1792, Louis XVI sanctionne un décret de l’Assemblée Nationale accordant à Greuze une pension de mille cinq cent trente-sept livre et dix sols.

Le peintre des sentiments a tenté vainement de mettre sa peinture au goût du jour. Il n’a pas le style révolutionnaire. Ni son « Départ des volontaires » ni sa « Mort de Marat » ne ramènent vers lui la faveur des clients. Il exécute quelques portraits, ceux de Dumouriez, Lavoisier, Robespierre, Talleyrand, du lieutenant Bonaparte et de Joséphine de Beauharnais. Cependant, sous le Consulat, let toiles de ce petit vieillard à cheveux blancs, frisés en ailes de pigeon, se vendent à bas prix. « On en trouve jusque chez les charbonniers et dans les étalages de la rue. »


Les Bonaparte sont gentils pour lui. On lui passe la commande d’un portrait du Premier Consul. Il doit demander un acompte pour acheter du matériel : mille francs, en 1801. Lorsqu’il s’éteint, en 1805, sans avoir achevé le portrait, le « Journal de Paris », qui autrefois avant chanté sa gloire sur trois colonnes, publie un entrefilet annonçant en trois ligne la mort du « célèbre Greuze, l’auteur de ces compositions pleines de charme »...

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