mercredi 20 novembre 2013

Finale

XXXII
 Finale

Alors, adieu, Tu n’oublies rien ?... C’est bien. Va-t’en
Nous n’avons plus rien à nous dire. Je te laisse.
Tu peux partir… Pourtant, attends encore, attends.
Il pleut… Attends  que cela cesse.

Couvre-toi bien surtout ! Tu sais qu’il fait très froid
Dehors. C’est un manteau d’hiver qu’il fallait mettre…
Je t’ai bien tout  rendu ? Je n’ai plus rien à toi ?
Tu as pris ton portrait, tes lettres ?...

Allons ! Regarde-moi, puisqu’on va se quitter…
Mais prends garde ! Ne pleurons pas ! Ce serait bête.
Quel effort il faut faire, hein ? Dans nos pauvres têtes,
Pour revoir les amants que nous avons été !

Nos deux vies s’étaient l’une à l’autre données toutes,
Pour toujours… Et voici que nous les reprenons !
Et nous allons partir, chacun avec son nom,
Recommencer, errer, vivre ailleurs… oh ! Sans doute,

Nous souffrirons… pendant quelques temps. Et puis, quoi
L’oubli viendra, la seule chose qui pardonne.
Et il y aura toi, et il y aura moi,
Et nous serons parmi les autres deux personnes

Ainsi, déjà, tu vas entrer dans mon passé !
Nous nous rencontrerons par hasard, dans les rues.
Je te regarderai de loin, sans traverser,
Tu passeras avec des robes inconnues.

Et puis nous resterons sans nous voir de longs mois,
Et des amis te donneront de mes nouvelles.
Et je dirai de toi qui fus ma vie, de toi
Qui fus ma force et ma douceur : « Comment va-t-elle ? »

Notre grand cœur, c’était cette petite chose !
Etions-nous assez fous, pourtant, les premiers jours
Tu te souviens, l’enchantement, l’apothéose ?
S’aimait-on ! … Et voilà : c’était ça, notre amour !

Ainsi donc, même nous, quand nous disions « Je t’aime »,
Voilà donc la valeur que cela a ! Mon Dieu !
Vrai, c’est humiliant. On est donc tous les mêmes ?
Nous sommes donc pareils aux autres ?... Comme il pleut !

Tu ne peux pas partir par ce temps… Allons, reste !
Oui, reste, va ! On tâchera de s’arranger,
On ne sait pas. Nos cœurs, quoiqu’ils aient bien changé,
Se reprendront peut-être au charme des vieux gestes.

On fera son possible. On sera bon. Et puis,
On a beau dire, au fond, on a des habitudes…
Assieds-toi, va ! Reprends près de moi ton ennui.
Moi près de toi je reprendrai ma solitude.



                                                                                                         

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